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#1 01-12-2016 19:07:13

Djillali
Membre
Lieu: algerie
Date d'inscription: 01-12-2016
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une histoire de mon passé Mercredi 13 Avril 2016 4:27

Aujourd'hui je vous propose une histoire sortie de ma mémoire , une histoire de mon passé, des mots qui racontent, qui content des parfums de chez moi : de Boukhanfar à Menerville ces hauts lieux de mes joies et peines décrits comme en un texte pictural qui gouache souvenirs et sentiments mêlés en une très forte union qui a pour témoin une nature incomparable de chez moi!
Je suis né à Boukhanfar, il y a très très longtemps, une éternité me semble-t-il ! Pourtant ma vie défile aisément devant mes yeux comme en une suite d’images flashées dans la tête.
Boukhanfar, c’est chez moi, un douar magnifique où j'ai grandi ! C’était mon havre de paix, mon paradis. Un lieu magique où tout en lui émerveille et gonfle d’aise, matin et soir, nos poitrines tranquilles. L’air pur, la vue sur mer, la nature, la bonté des gens la verdure généreuse et jusqu’à nos jardins maraîchers, très nourriciers , nos arbres fruitiers qui se déclinaient en figuiers et figuiers de barbarie,pruniers, poiriers, pommiers,tout concourait à nous faire accroire que l’Eden était là, qui nous entourait en refuge douillet et protecteur où nous y vivions par comme par en une chance inouïe offerte à des élus admis comme une faveur divine,en ce paradis extraordinaire!
Nous évoluions dans la nature entourés de la grande famille Boutiche. Nos parcelles de terrain bien que délimitées n’étaient pas moins ouvertes à tous.On allait chez les uns et les autres sans chichis. On déjeunait chez l’un, dînait chez l’autre.On était partout chez nous et nos mamans, nos sœurs sortaient de chez elles, habillées décemment certes mais sans plus. Et personne n’y voyait rien à dire !
Elles vaquaient à leurs occupations quotidiennes .Elles allaient à l’eau, travaillaient dans leurs champs, gardaient leurs bêtes, allaient à la corvée de bois, allumaient le feu, faisait cuire les repas, s’occupaient de leurs enfants, binaient les champs, cueillaient fruits et légumes ! La lessive était faite à la main et les vêtements rincés en ce magnifique point d'eau, Abroune pour ne pas le citer,notre source familiale dont les eaux claires et fraîches abreuvaient hommes et bêtes toute l’année.
Nos mères, nos sœurs étaient constamment dehors et les présences masculines ne les dérangeaient pas ! Il n’y avait pas encore ce sentiment imbécile qui identifiait la femme à un objet qu’on désire comme une bête en rut, à une femelle qui doit cacher son corps à la vue de tous, pour ne pas susciter les regards, baveux, concupiscents d’une gente masculine à l’affût du moindre centimètre carré de peau découverte et nue, en maugréant devant l’indécence des moutabarridjates sans foi ,ni loi. Il n’y avait en ce temps là, aucun malentendu d’aucune sorte entre des personnes de sexes différents qui coexistaient harmonieusement ! Le respect régnait en chef et la femme était la sœur, la mère, la grand-mère de tous.
J’évoluais dans ce doux paradis entouré de l’amour des miens et la guerre arriva un matin de novembre .
Notre vie changea ! La quiétude déserta nos maisons ! Les rires s’éteignirent et les visages se fermèrent. Bientôt, il arriva une chose terrible, tous les habitants furent rassemblés dans des camps de regroupement de masse situés toujours près d'une caserne militaire pour les protéger des fellagas, ces bandits de grands chemins, leur dit-on qui allaient venir tout leur voler ou tuer sans raison des familles isolées.
L'autorité militaire se proposa de les protéger si bien qu’une rébarbative clôture de fils de fer barbelés entoura bientôt des petites maisons en pisé bâties à la hâte ! Une unique entrée et la prison à ciel ouvert donna le sentiment à tous que la vie d’avant était bien finie.Et que les beaux jours se sont enfuis d’un vol mystérieux, pénible et tragique.
Les conditions de vie étaient tellement difficiles dans le camp et tellement oppressantes que mon père s’obligea la mort dans l’âme à opter pour un déracinement déchirant et nous voilà en ville, les uns sur les autres, dans un petit deux pièces,cuisine comprise, loués à un parent de mon père, qui abrita les six membres de la famille qui s’entassèrent à qui mieux mieux, dans cette boite à sardine passant d’une prison à une autre.
Cette année là, j’allais sur mes cinq ans et dés septembre, à la fin des vendanges, mon père sous la pression maternelle, m’inscrivit à l’école municipale du village en classe de maternelle.
Et un premier octobre 1957, par un mardi matin radieux, un jour de marché hebdomadaire à Menerville, mon père son panier multicolore en doum tressé par mon grand-père à la main, m’accompagna à l’école. Elle se trouvait au centre -ville cette coquette bâtisse sur deux étages, adossée confortablement amoureusement à la mairie du village.On y entrait par un large portail finement travaillé qui donnait directement sur une cour goudronnée, joliment égayée de frênes splendides dont le feuillage vert et généreux offrait son ombre à trois ou quatre,rafraîchissante les jours de canicule automnale à des classes, trois ou quatre construites joliment en L,J’entrai à l’école ce jour-là , qui prit date, car ma vie se bouleversa.
Je restais dans mon coin entouré d’une trentaine de gamins garçons et filles de mon age qui couraient, criaient, se disputaient, parlaient pour certains une langue qui ne m’était pas accessible, et jouaient à des jeux qui étaient totalement inconnus au bouseux que j'étais : billes, saute-moutons, marelle, osselets, cache-cache, balançoire etc…
A huit heures très précises,, je sursautai. Dans mon dos, la cloche de l’école carillonna et tout s’arrêta ! On nous fit mettre en rang et le directeur s’avança vers nous avec un air très sévère me sembla-t-il ce matin là.
Il ouvrit un registre et commença l’appel des mioches qui à l’écoute de leur nom entraient un par un en classe. Les patronymes s’égrenaient l’un derrière l’autre et bientôt je me retrouvais tout seul, apeuré et tout tremblant devant le regard irrité du directeur qui se demandait qui jetais.
- Comment t’appelles-tu, toi ? n’ayant pas compris la question je restais muet regardant cet homme qui pour moi était un mystère comme la langue qu’il parlait. Comment t’appelles-tu ? me répéta-t-il en arabe cette fois-ci .
- Boutiche Djillali.
- Ah c’est toi le petit Boutiche ? Ton père travaille à la gare ?Tu t’appelles Mohamed pas Djillali ! En voilà un idiot de chenapan qui ne connait même pas son nom.Et là, il me prit par l’oreille m’administra une petite taloche sur le derrière du crane et dit :
- Allez vite en classe.
Je rentrai en classe et une vie nouvelle s’ouvrit à moi. Mademoiselle de Rose toute souriante m’indiqua mon pupitre et la première leçon de ma vis scolaire commença.
A onze heures, mon père vint me chercher.Nous rentrâmes à la maison. A midi, autour de la meida familiale, un plat de Baghrir au miel m’attendait. C’était mon plat préféré et celui que toutes les mamans préparaient à l’occasion de l’entrée à l’école de leur enfant.
Là, je surpris tout le monde en disant, à l’école, je m’appelle Boutiche Mohamed.Ma mère était encore plus surprise que moi.Elle avait décidé à ma naissance de appeler Djillali et mon père, tout têtu qu’il était à toujours n’en faire qu’à sa tête,me fit inscrire à l'insu de ma mère à l’état civil sous le prénom de Mohamed .Et le secret fut très bien gardé durant cinq.Ma mère lui en a voulu pendant longtemps , pendant si longtemps que sa vie durant elle s’obstina à ne m’appeler que Djillali tout en interdisant à quiconque de m’appeler autrement.
Et ma vie scolaire qui dura presque vingt ans, débuta, en une matinée d’octobre 1957, par une brouille , une dispute parentale....

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